Discours de Marine Tondelier - 14 octobre 2023

NOUS SOMMES LES ÉCOLOGISTES Discours de Marine Tondelier Cité fertile - 14 octobre 2023

Chers ami.e.s, Nous avions prévu, de longue date, de nous retrouver ce week-end et nous nous apprêtions à vivre un moment particulier pour les écologistes : celui du lancement de notre nouveau mouvement. 

 Cette semaine a effectivement été  particulière, mais de bien d’autres manières : parceque la violence de ce monde refait surface dans des proportions terrifiantes.

Hier à Arras, alors que notre pays s'apprêtait à commémorer la mort tragique de Samuel Paty que nous avons encore tous en tête,, un autre professeur, Dominique Bernard, a été victime d’une attaque terroriste, tué dans son lycée pour avoir tenté de protéger ses élèves. Deux autres agents ont été gravement blessés.  C’est un choc terrible, et c’est le temps du recueillement, Le temps de l’union nationale aussi. Et ensemble, cet après-midi, nous adressons nos pensées émues à la communauté éducative de ce pays à nouveau terriblement  éprouvée,  aux élèves et aux parents d’élèves du Lycée Gambetta d’Arras, et à toutes celles et ceux qui s’en sentent aujourd’hui proches et solidaires. L’école c’est le cœur de notre République, là où est formée notre jeunesse, là où on apprend, où on grandit, où on devient citoyen. L’école devrait être un endroit sacré. Les enseignants, et toute la communauté éducative, devraient être intouchables. 

C’est dire que notre société va mal, quand on attaque ces lieux, quand la haine cible notre jeunesse et celles et ceux qui l’éduquent. Notre tristesse est immense. Je vous propose que nous observions tous ensemble une minute de silence pour Dominique Bernard. 

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 Je vous remercie. 

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Ce drame est intervenu 6 jours après des attaques terroristes en Israël qui ont stupéfait par leur ampleur et par leur cruauté.  Les images que chacun a pu voir montrent l’horreur absolue de l’attaque menée par le Hamas samedi dernier. Les témoignages reçus depuis révèlent toute l’ampleur de ces abominations : des familles assassinées au réveil, égorgées, alignées contre des murs et abattues froidement, des actes qui rappellent les pires heures de l’histoire de l’humanité. Plus de 1300 morts et 3000 blessés. Notre solidarité avec le peuple israélien doit être totale. 

La société israélienne dans son intégralité est traumatisée et cela la ramène à des cauchemars profondément ancrés en son sein. Oui les évènements de samedi dernier s’apparentent à des pogroms. Imaginez ce que cela peut provoquer pour une société dont font encore partie des survivants de la Shoah. Comment ne pas transformer cette douleur profonde en rage. Ce sera un enjeu majeur des années à venir et nous, écologistes, serons présents à côté des Israéliens. 

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Nous sommes aussi terriblement choqués de ce que subissent en retour les Palestiniens. Les 2 millions et demi d’habitants de Gaza entassés dans une prison à ciel ouvert de 360 km2 sont passés d’une situation de blocus, qui les éprouve durement depuis maintenant seize ans, à une situation de siège. Les bombardements sont d’une intensité rare. Déjà plus de 2 500 morts dont 700 enfants. Les hôpitaux devraient cesser de fonctionner dans les heures qui viennent faute de carburants pour leurs groupes électrogènes et ne plus être en mesure d’apporter secours aux civils qui n’ont ni eau, ni nourriture, ni médicaments. C’est un drame humain d’une ampleur rare qui se dessine. A ce titre, la demande hier d’évacuer toute la partie nord de Gaza est un signal particulièrement effrayant. 

Une autre caractéristique de ce conflit, un aspect assez unique, c’est l’impossibilité de fuir pour les civils palestiniens. Il faut se représenter ce que cela signifie d’être bombardé mais de n’avoir nulle part où aller. Nous devrions réfléchir collectivement à ce qu’implique, humainement, politiquement et juridiquement, cette impossibilité de fuir un conflit. Oui, il y a urgence. Urgence à la libération des otages. Urgence à l’aide humanitaire. Urgence aussi à ce que la France demande publiquement au gouvernement israélien de réagir de façon proportionnée et tente de décourager une attaque terrestre, dont les conséquences seraient dévastatrices pour les civils à Gaza et pourrait conduire à une escalade régionale. C’est d’ailleurs ce que, au fond, espère le Hamas. Oui, les Israéliens ont le droit légitime de se défendre pour assurer leur sécurité. Ils doivent aussi éviter l’esprit de revanche qui conduit souvent au pire. Notre boussole doit être le droit international et ces opérations du gouvernement israélien y contreviennent objectivement.  

 Après l’effroi du 11 septembre 2001, les États-Unis ont orchestré une réponse sortant des cadres posés par le droit international et le droit international humanitaire, de Guantanamo à l’invasion de l’Irak. D’une voix forte, la France avait su prévenir des dangers de telles actions, entrant ainsi dans l’Histoire. Le Moyen-Orient, mais plus largement le monde entier, subit encore les conséquences de ces représailles illégales. 

L’urgence est donc que la France assume un rôle exemplaire et retrouve la voix singulière qu’elle a su porter dans le passé. D’une voix juste, elle doit refuser de donner un blanc-seing au gouvernement israélien, gouvernement d'extrême-droite, qui continue à promouvoir la colonisation, et que nous condamnons fermement. Et la France doit être du côté du droit et de nos valeurs de justice, ultimes remparts pour nous protéger de la violence et de sa spirale tragique. Ce qui se passe depuis samedi démontre à quel point le conflit israélo-palestinien est et restera central et structurant pour la paix, la sécurité de la région et, en réalité nous le savons, plus largement que ça. Sa résolution doit redevenir une priorité centrale pour la diplomatie française et européenne.  La seule garantie de sécurité pour le long terme repose sur une solution politique fondée en droit. 

La France et l’Union européenne doivent s’atteler à la faire émerger, s'emparer du volet politique du processus de paix en plus d’assumer pleinement son rôle de bailleur financier et humanitaire pour les deux millions et demi d’habitants de Gaza qui n’ont ni ressource ni espoir.

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Laissez-moi partager rapidement un sentiment et une idée importante qui me tient particulièrement à cœur. Si les intentions de ceux qui provoquent la mort de ces civils diffèrent, nous devons fermement rappeler, en tant qu’humanistes, que toutes les vies ont la même valeur : celle du civil israélien qui est assassiné par un terroriste du Hamas dans un kibboutz et celle du civil palestinien qui est victime d’un bombardement à Gaza. 

Cette reconnaissance est nécessaire pour retrouver la possibilité même d’une conversation politique au sens noble du terme. Face à ces horreurs, et à ce que nous ressentons dans notre chair, je vous propose une minute de silence pour nous recueillir pour toutes les victimes innocentes d’un conflit qui n’a que trop duré. Pour le peuple israëlien, pour le peuple palestinien.  Et je sais que cette valeur résonne particulièrement en vous : pour la paix. Minute de silence. 

 * * * 

 Je vous remercie.

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 Oui, l’actualité est atroce. 

En ‘tant que responsables politiques, nous avons deux devoirs :  D’abord trouver les mots pour décrire la violence.  Puis trouver les moyens de construire une société qui non seulement la refuse mais lui propose aussi et surtout une alternative. Cela doit être notre ambition.  

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 Nous l’avions prévu de longue date et nous vous remercions d’être là : aujourd’hui devait être un moment joyeux et généreux pour vivre ensemble le lancement de notre nouveau mouvement. Cette nouvelle étape de l’écologie politique. Evidemment que toute la semaine, nous nous sommes posé la question de maintenir ou non.  Lancer un nouveau mouvement, était-ce bien le moment ? Mais la réalité, c’est que jamais le monde n’a autant eu besoin de politique. Jamais le monde n’a eu autant besoin d’échange. Et surtout, en cette période troublée, quelle plus belle idée que celle de se retrouver pour faire face, ensemble. Oui nous avons besoin, la société a besoin de faire, de refaire de la politique. Et d’en faire bien. D’en faire mieux. Il se trouve que nous pensons, depuis 50 ans, que les réponses qui permettent réellement de construire la paix sont les mêmes qui permettront d’éviter la destruction du vivant et de garantir la justice sociale. Le projet écologiste est construit sur des valeurs fortes. Ce sont précisément ces valeurs qui permettent de répondre à la violence. 

L’ouverture,  l’humilité,  le respect,  la solidarité,  la justice et la lucidité, même quand elle n’est pas confortable. L’engagement aussi, car c’est par lui que l’on peut sortir de la stupéfaction et de l’anxiété face aux défis qui sont devant nous. Et cette question de l’engagement était justement au cœur de nos Etats généraux de l’écologie.  Car on ne s’engage plus aujourd’hui comme il y a 40 ans, on ne prend plus sa carte dans un parti comme on entrerait en religion, épousant en même temps sa cause, tous ses codes … et l’ensemble de ses militants avec qui il faudrait passer tout son temps libre.  Evidemment, certains, certaines, continuent de se dédier intégralement à la cause. Ils sont les piliers indispensables de notre action et nous les en remercions infiniment. Mais beaucoup ont aussi l’écologie dans un coin de leur tête tout en éprouvant une appréhension à l’idée de devenir “militants”.  

 L’étude que nous avons menée avec Harris Interactive et que Jean-Daniel Lévy vous a présentée tout à l’heure repose sur des groupes d’entretien menés par une psychosociologue sur le peuple de l’écologie au sens large. Elle nous montre la même chose que vos questionnaires et vos doléances : bien que l’envie et je dirais même le besoin d’écologie soient de plus en plus présents dans la société française, la marche de l’engagement reste très haute, voire elle fait peur. 

La criminalisation des écologistes, le sentiment d’impuissance, le fait de ne pas trop savoir par où commencer, vers qui se tourner, le sentiment d’illégitimité, tout cela a un impact fort. Mais vous connaissez les écologistes : ils ne se résignent jamais. Ils s’adaptent. Ils consultent. Ils cherchent des solutions et cherchent surtout à les mettre en œuvre. Alors nous nous sommes retroussé les manches et nous avons travaillé avec la plus belle des méthodes : la démocratie ouverte et participative.

Cette façon de faire est d’ailleurs celle avec laquelle les maires écologistes ont gagné leurs élections municipales. C’est aussi de cette manière qu’ils gouvernent et conduisent le changement, au quotidien. Cette méthode a fait ses preuves. Nous nous en sommes très largement inspirés et je remercie Léonore Moncond’huy, Maire de Poitiers et garante de tout notre processus de refondation, qui y a contribué en première ligne. Un comité de pilotage de la démarche composé à plus de la moitié de membres de la société civile, et ouvert, à titre d’observateur indépendant, à l’ONG Démocratie Ouverte qui fait référence en la matière. 150 jours d’écoute. 25 000 questionnaires remplis en ligne. Des centaines de cahiers de doléances. 250 ateliers organisés sur tout le territoire, et dans tous les types de territoires. 180 structures de la société civile écologiste consultées, des plus grosses que toutes et tous vous connaissez, à de toutes petites associations locales, représentant en tout 2 millions d’adhérents. Nous nous sommes tus pour entendre ce que les écologistes de ce pays avaient à nous dire. Pendant cette grande enquête populaire : nous avons écouté. Puis nous avons analysé, tout l’été. Chaque doléance a été lue, les résultats des questionnaires et enquêtes, les remontées des ateliers ont été compilés, décryptés, présentés. 

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 Puis à la rentrée, le travail pour passer au concret a commencé. 60 personnes tirées au sort parmi les participants au processus,  Pour moitié adhérents d’Europe Ecologie Les Verts, Pour moitié non adhérents, se sont concentrés sur 3 sujets, en plusieurs séances de travail, physique et en ligne : “L’accueil et l’inclusion” “L’engagement et l’organisation” “L’utilité et la confiance” Le but de tout cela ? Dessiner ce nouveau mouvement.  Un nouveau mouvement où l’on ne se dit jamais “je ne suis pas suffisamment écolo”, ou “pas suffisamment parfait”, “donc je n’y ai pas ma place”.  Il est difficile, voire impossible en réalité, d’être un écologiste “parfait” dans une société qui ne l’est pas. Alors “Venez comme vous êtes” et changeons là ensemble, cette société ! 

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 En octobre et dans des délais, je l’admets, un peu serrés que nous nous étions fixés, nous avons travaillé et concerté la feuille de route de notre nouveau mouvement.  Elle a été adoptée cette nuit  après 3 jours de vote en ligne, bloc par bloc.  

A 84,4% Vous Avez Voté POUR. 

L’envie de changement est donc confirmée. La confiance dans le processus et dans ce que nous allons faire aussi. Oui, ce vote dit une chose simple : nous sommes entrés dans l’âge de la maturité.  Nous savons instaurer entre nous l’esprit de coalition que nous souhaitons pour le pays. Soyons fiers de cette transformation. Elle est fidèle, parfaitement fidèle, à ce que nous ont demandé les 30 000 participants des Etats généraux de l’écologie.  Nous nous sommes engagés à le faire et nous sommes déjà en train de le faire : ON CHANGE !  

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 C’est donc le moment de répondre à la question que l’on me pose beaucoup en ce moment : qu’est ce qui va changer ?  Tout. Tout va changer… Tout… sauf  nos valeurs !  L’ambition change :  “Les Écologistes” c’est un mouvement qui aura pour objectif de mettre en lien et en action celles et ceux qui dans ce pays se sentent écologistes. Tout simplement. “Les Écologistes”, ce sera donc bien plus qu’un parti politique. La manière de s’engager change aussi :  “Les Écologistes”, c’est un mouvement large, divers, ouvert, qui permet un engagement “à la carte”. 

Qu’un écologiste souhaite juste se former, s’informer, participer à une action, participer à des travaux programmatiques, bénéficier de conseils pour limiter son impact sur l’environnement ou encore préparer les élections municipales dans sa ville, même sans pour autant “prendre sa carte” comme on dit, il sera le bienvenu.  Mais celles et ceux qui souhaitent aller plus loin pourront, évidemment, aussi adhérer officiellement et participer ainsi aux décisions structurantes du mouvement. 

Venez comme vous êtes, mais aussi et surtout venez où vous voulez et comme vous voulez ! La forme change aussi :  “Les Écologistes” combinent l’ouverture et la flexibilité des modalités d’engagement permises par le format “mouvement”, mais sans pour autant s’affranchir des règles d’organisation et de régulation démocratique, ce à quoi cette forme sert malheureusement trop souvent de prétexte dans d’autres familles politiques. Nous réaffirmons le principe d’une démocratie interne vivace, efficace, solide comme l’un des fondamentaux de l’écologie, indispensable à une structure politique durable, transparente et saine. Les outils aussi vont chager :  Tout au long de la journée, nous vous les ferons découvrir. 

Tout au long des prochaines semaines, vous pourrez commencer à vous en servir. Nouveau site internet ; Plateforme de mobilisation en ligne ; Application smartphone ouverte à tous les écologistes de ce pays ; Ecole de formation alliant écologie populaire, apprentissage des savoirs militants et formation des cadres pour celles et ceux qui prendront des responsabilités dans le nouveaux mouvement,  et pour celles et  ceux qui souhaiteront préparer des élections.

Toutes ces idées, nous les avions depuis longtemps, et ‘nous y sommes. Ils vont être de puissants outils d’information, d’organisation, de formation et de mobilisation. Et puis, le corps social de notre mouvement va aussi devoir changer :  Nous sommes aujourd’hui le 1er parti des centres villes, les dernières élections européennes et municipales l’ont montré. Nous voulons aussi devenir le premier parti des ruralités. 

Et nous allons faciliter l’engagement des classes populaires et des habitants des quartiers populaires dans le mouvement : un travail spécifique sur ce sujet débutera dès la semaine prochaine. Et puis enfin, mais ça vous l’avez déjà compris, le nom change :  EELV s’ouvre et laissera progressivement la place à « Les Écologistes ». Vous avez sûrement en tête l’adage de Nicolas Boileau : “ce qui se conçoit bien s’énonce clairement… et les mots pour le dire viennent aisément”. Simplicité,  accessibilité.  On le dit,  on le fait ! 

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J’en suis très consciente, cela fait beaucoup de changement. Beaucoup. D’un coup. Mais c’est ce qui nous était demandé.  Et c’est la promesse que nous avions faite ! Alors un merci sincère et reconnaissant à toutes celles et ceux qui l’ont rendu possible, chacun à son poste. Les salariés d’Europe Ecologie Les Verts, qui comme vous le savez sont bien trop peu nombreux mais toujours à la hauteur du défi permanent qu’est la vie d’un parti, du nôtre en particulier, Le Bureau exécutif, solide et solidaire, dont la cohésion a permis de relever le pari de ces premiers mois de mandat,  Les Secrétaires Régionaux et responsables de groupe locaux qui ont fait vivre la démarche partout en France et seront à la base de son déploiement. Donc je vous en remercie. Et puis vous, tous, qui avez suivi, de près ou de loin. Vous, qui avez été intrigués, curieux, motivés au premier instant ou qui avez pris le temps de vous laisser convaincre par la démarche.  Vous qui y avez consacré de l’attention,  du temps,  de l’énergie :  mer-ci ! 

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 Je sais qu’il y a des inquiétudes, et c’est normal.  Vous le savez, ma nature et si vous le ne savez pas vous le saurez à présent, n’est pas de passer en force. Je n’aime pas cela. Ma nature c’est de convaincre.  Mais ce n’est pas qu’une question de nature, c’est aussi une conviction politique : je crois et nous croyons chez Les Ecologistes, que c’est en convaincant que l’on peut avancer collectivement, ce qui est indispensable à la réussite de notre projet et c’est donc ce que nous ferons. 

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 Cette feuille de route n’est évidemment qu’un début.  Cette journée marque le lancement d’un nouveau mouvement, d’un nouvel état d’esprit,  de nouveaux outils,  d’une nouvelle aventure.  Mais à nous, avec toutes celles et ceux qui nous rejoindront, de le dessiner, de l’animer, de le faire connaître, de le faire grandir, de le faire ga-gner : son avenir et son succès s’écriront ensemble, dans le même état d’esprit que celui qui a animé les Etats généraux de l’écologie :  ouverture,  démocratie,  convivialité,  coopération,  envie de fédérer,  objectif de gagner la bataille du vivant sur tous les terrains où nous avons à la mener, du local au national et jusqu’aux échelons européen et international, évidemment, car nous sommes et nous resterons membres de la grande famille des Global Greens et du Parti vert européen. 

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 Alors ça y est, nous y sommes. Vous vous êtes réveillés écologiste ce matin, comme d’habitude. Vous vous coucherez ce soir écologiste ET membre des Écologistes. Oui, aujourd’hui, plus que jamais, nous sommes écologistes ! Nous sommes les ECOLOGISTES. 

Nous sommes parents et  grands-parents inquiets pour leurs enfants ? Nous sommes les ECOLOGISTES. 

Nous sommes la jeunesse, lucide, déterminée, qui se mobilise et ne comprend pas que nous ne paniquions pas ?  Nous sommes les ECOLOGISTES. 

Nous sommes les promeneurs émus quand ils et elles se baladent en forêt ?  Nous sommes les amoureuses de la faune qui rêvent devant les documentaires célébrant la vie sauvage ? Nous sommes les ECOLOGISTES. 

Nous sommes les malades de l’environnement, les familles d’enfants asthmatiques, ou victimes de cancers pédiatriques et leurs proches Nous sommes les ECOLOGISTES. 

Nous sommes les personnes en situation de handicap qui souhaitent construire une société et un mouvement réellement accessible. Nous sommes les ECOLOGISTES. 

Nous sommes les ouvriers, les artisans, inquiet·es de leurs conditions de travail, de la menace permanente de délocalisation, et aussi de leur santé et des risques industriels, Nous sommes les ECOLOGISTES ! 

Nous sommes les personnes en situation de précarité qui réalisent que la solution durable à leurs problèmes, nécessite un changement radical de modèle et un nouveau pacte social, juste et partagé. Nous sommes les ECOLOGISTES. Nous sommes entrepreneurs conscients des limites planétaires,  de la nécessité d’une nouvelle relation au travail, qui inventent de nouvelles façons de faire. 

Nous sommes les ECOLOGISTES. Les aidant·es, les soignant·es et les enseignant·es qui connaissent la valeur du soin, de la coopération et du partage, qui contribuent à la société de liens. Nous sommes les ECOLOGISTES. 

Nous sommes les simples citoyens et citoyennes, conscient·es de l’importance du convivialisme et qui veulent refaire société.  Nous sommes les ECOLOGISTES. 

Nous sommes aussi les ultra-marins, qui se battent  contre les ravages du chlordécone et des sargasses aux Antilles,  contre l’exploitation du nickel en Nouvelle Calédonie,  contre les conséquences des essais nucléaires en Polynésie, contre les mines d’or et  l’orpaillage clandestin en Guyane, pour le tram-train à la Réunion  et pour l’accès aux soins à Mayotte Nous sommes les ECOLOGISTES. 

Nous sommes les ECOLOGISTES. Et nous ne répondons pas, non jamais, à la brutalité du monde par de la brutalité. Nous ne répondrons  non jamaispas à la brutalité politique par de la brutalité. Ne croyez pas que ce soit de la faiblesse !  C’est même tout le contraire ! Ce sont nos valeurs. C’est notre priorité donnée à la douceur. Loin du bruit,  nous on apaise, on protège, on construit. Nous sommes les ECOLOGISTES 

Nous sommes des millions à nous sentir impuissants face aux crises climatiques.  Et nous serons bientôt des millions à nous tenir, debout, ensemble, pour le vivant et la justice ! 

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Nous sommes les ECOLOGISTES Et nous sommes forts de nos valeurs, de notre projet, de nos combats, des leçons tirées de nos échecs, des enseignements tirés de nos victoires. Nous sommes les écologistes, et, je terminerai par là : nous sommes forts de notre histoire.  Cette histoire politique débute notamment avec la candidature de René Dumont à l’élection présidentielle de 1974, la première candidature écologiste à la présidentielle. Je ne sais pas vous mais moi je pense souvent à lui. Très souvent. A ce qu’il a posé dans le débat public, avec courage et sous les moqueries. Oui, cette eau elle est de plus en plus précieuse. Et la société française s’en rend désormais compte. Tard, très tard.  On pense à toi René.  Tu en as pris des coups, et tous les autres après toi.  

Être écologiste, c’est comme ça. Sans doute, après tout, est-il d’ailleurs normal que l’on prenne les premiers coups si l’on est en avance sur son temps.  Longtemps notre histoire aura été de nous battre pour être entendus. Puis de nous battre pour être crus. Puis de nous battre pour être suivis. Et nous avons gagné certaines batailles et nous gagnerons les suivantes. Paul Eluard écrivait qu’il n’y a pas de hasards, que des rendez-vous. Il se trouve que le calendrier nous fait un joli clin d'œil parce que le week-end de notre lancement correspond aux 40 ans de la marche pour l’égalité et contre le racisme. Le 15 octobre 1983, une trentaine de jeunes et de militants partaient du quartier de La Cayolle, à Marseille, ils entamaient une marche non-violente jusqu’à Paris. Après près de deux mois de marche, plus de 100 000 personnes se rassemblaient à la capitale.  

En Seine-Saint-Denis où nous sommes rassemblés aujourd'hui, nous savons que ce combat n’a jamais cessé, et que vous êtes nombreuses et nombreux dans cette salle à le mener. Soyez assurés que nous continuerons de le mener avec vous. Car sur ce combat comme sur les autres, non, nous n’abandonnerons jamais !  Il n’y a pas de hasards,  Il n’y a que des rendez-vous. La vie nous avait déjà fait un joli clin d'œil le jour du lancement des Etats généraux de l’écologie, que l’actualité sociale chargée du début d’année nous avait amenés à décaler plusieurs fois jusqu’à tomber le 9 février 2023. La veille, un des intervenants nous avait fait remarquer que ce lancement coïncidait jour pour jour avec le 100ème anniversaire de la naissance d’André Gorz, intellectuel, journaliste, critique économique et surtout pionnier de l'écologie politique.  Alors André nous avait accompagnés en pensée toute la journée. 

S’il avait été là, ce jour là, s’il avait là aujourd’hui, il nous aurait sûrement rappelé à cette occasion que c’est sur une vision de l’avenir que les sociétés règlent leur projet. Et vu l’avenir sombre qui se dessine, tant d’un point de vue environnemental, démocratique et social, tant au plan national qu’international, comment se projeter ? Nous sommes en 2023. 

Personne ne peut garantir aux enfants qui naissent cette année que la planète sera encore habitable pour l’année de leurs 30 ans.  Ce n’est pas nous qui le disons, c’est le GIEC, consensus scientifique inédit dans l’histoire de l’humanité. Alors on va continuer à se battre pour écrire une suite heureuse à cette histoire. Continuer à avoir le courage d’être précurseurs, quitte, oui, à prendre des coups, c’est pas grave. Continuer à dénoncer des absurdités qui sont souvent confortables.  

A expliquer sans donner de leçons.  

Et à mener le combat sans relâche. Pour le vivant. Pour le climat. Pour l’emploi Pour la biodiversité. Pour la santé. Pour la justice. Pour la paix. 

C’est à dire AUSSI pour les enfants d'Israël,  Pour les enfants de Gaza  Pour les enfants du Haut Karabakh,  

Oui, on continue, et on continuera tant qu’il le faudra. Parce qu’ensemble, nous avons le pouvoir d’écrire le futur, et, vous savez quoi c’est exactement ce que nous allons faire !

Discours de Marine Tondelier, seul le prononcé fait foi - 14 octobre 2023