Pour sortir de la crise, la France a besoin d’une Constituante !

Depuis la dissolution, les institutions de la Ve République démontrent chaque jour davantage leur inaptitude face aux défis démocratiques et aux aspirations populaires du XXIe siècle.

Avec la Ve, la France est une démocratie de faible intensité. Intouchable, le président de la République ne trouve aucun réel contre-pouvoir face à lui. Le Parlement est « rationalisé », voire entravé, l’Assemblée peut être dissoute selon le bon vouloir du Président, le Premier ministre a été relégué au rôle d’exécutant et la décentralisation n’a jamais vraiment été aboutie.

Ce régime présidentialiste très déséquilibré ne peut mener qu’à un “exercice solitaire du pouvoir”.

Soumises au bon vouloir d’un Président puissant et esseulé, les institutions républicaines résisteraient difficilement à un choc autoritaire.

En 2022, Gwendoline Delbos-Corfield, alors euro-députée écologiste a commandé une étude à des juristes pour tenter d’évaluer ce qu’il se passerait si un dirigeant autoritaire arrivait au pouvoir en France. La conclusion de ces juristes à ce « stress test autocratique » est sans appel : “la France est particulièrement mal placée pour résister à un processus de démantèlement des contre-pouvoirs qui serait organisé par une nouvelle majorité autoritaire”. Ces résultats devraient nous interpeller dans un contexte de grande bascule de démocraties vers des régimes illibéraux, voire néo-fascistes, partout dans le monde, jusqu’à la Maison-Blanche.

La Ve République est le produit de son époque. Mais le monde de 1958 n’existe plus. Nous avons connu depuis les impacts du réchauffement climatique et l’effondrement de la biodiversité, l’approfondissement du projet européen, la révolution féministe, la démocratisation de l’enseignement, l’avénement des réseaux sociaux et l’arrivée de l’IA… Nous ne vivons plus dans le même monde.

Un monde devenu plus incertain depuis les élections législatives de 2024. Notre Assemblée est pluraliste, mais fonctionne toujours avec les outils du fait majoritaire et de la pratique verticale du pouvoir. Cela ne peut pas fonctionner. Tant que nous n’adapterons pas nos règles à la réalité politique du pays, les blocages risquent de perdurer : en cas de nouvelle dissolution, la division de l’Assemblée en 3 blocs serait-elle amenée à évoluer ? Rien n’est moins sûr.

Alors, comment faire ?

Continuer à subir les uns après les autres les 49.3 des gouvernements successifs, continuer d’accepter qu’une minorité impose son point de vue ?

Il est enfin temps de tout changer !

Nous, membres des Écologistes, et des groupes parlementaires écologistes et apparentés, nous pensons indispensable de sortir de la Ve république pour sortir de la crise politique. Et cela de la plus belle manière qui soit : en sollicitant le peuple constituant.

Lors de ses vœux aux Françaises et aux Français, le Président de la République a annoncé vouloir les consulter, en ayant en tête le recours au référendum. Mais sur quoi, mystère… Le sait-il lui-même ?

Dans le chaos politique dans lequel est plongé notre pays, la question la plus importante, structurante, à poser aux citoyennes et citoyens est très simple et c’est la suivante : souhaitez-vous la mise en place d’une Assemblée constituante, chargée de proposer une nouvelle Constitution pour notre pays ?

D’aucuns pourraient arguer que cette préoccupation est très loin des préoccupations quotidiennes de nos compatriotes. Nous pensons l’inverse. Ce n’est pas un hasard si la principale revendication portée par les Gilets jaunes sur les ronds points était le Référendum d’Initiative Citoyenne (RIC). Ce n’est pas un hasard si les millions de Français hostiles à la réforme des retraites étaient tout autant heurtés par le contenu de la réforme que par l’utilisation du 49.3, brandi puis utilisé pour passer au forceps un texte qui n’avait de majorité ni dans la rue, ni à l’Assemblée nationale.

En réalité, le fonctionnement de nos institutions intéresse tous les Français et Françaises, car tout le monde voit bien que nous marchons sur la tête et que les règles du jeu sont pipées. C’est en éloignant le spectre d’une pratique solitaire et autoritaire du pouvoir que nous rapprocherons les citoyennes et citoyens des urnes et que nous aurons une petite chance de rétablir la confiance dans la politique.

De nombreux constitutionnalistes, chercheurs, responsables politiques ou citoyens se sont déjà penchés sur ce que devrait être un processus constituant ouvert, équilibré et efficace, permettant de passer à une VIe République.

Nous avons, nous aussi, notre idée sur la question. Mais ce que nous souhaitons avant tout, c’est ouvrir le débat sur le sujet dans le pays et entendre ce que les autres partis et la société civile ont à en dire.

Surtout, nous voulons constituer, avec toutes celles et ceux qui le souhaiteront, une coalition pour la constituante, afin de réfléchir et de porter le sujet ensemble, et nous appelons par cette tribune toutes celles et ceux que le projet intéresse à venir y travailler avec nous.

Nous souhaitons engager un processus public d’auditions sur le sujet, pour qu’une réflexion de fond s’engage dans notre pays sur la nécessaire réforme de nos institutions.

Nous, premiers signataires de cette tribune, y sommes prêt·es. Et vous ?

Marine Tondelier, secrétaire nationale des Ecologistes
Cyrielle Châtelain, présidente du groupe Écologiste et social à l’Assemblée nationale
Guillaume Gontard, président du groupe écologiste - solidarité et territoires au Sénat

Yannick Jadot, sénateur de Paris
Mélanie Vogel, sénatrice des Français·es de l’étranger, Vice-Présidente du groupe écologiste - solidarité et territoires au Sénat
Alexis Corbière, député de Seine-Saint-Denis
Pouria Amirshahi, député de Paris
Monique De Marco, sénatrice de la Gironde
Arnaud Bonnet, député de Seine-et-Marne
Akli Mellouli, sénateur du Val de Marne
Christine Arrighi, députée de Haute-Garonne
Aïssa Ghalmi, membre du bureau exécutif des écologistes en charge du Projet
Gaëlle Lahoreau, vice-présidente de la Région Centre-Val de Loire
Sophie Bussière, porte-parole nationale des Écologistes
Marie Pochon, députée de la Drôme
Hélène Hardy, membre du bureau exécutif des Écologistes
Sabrina Sebaihi, députée des Hauts-de-Seine
Alain Coulombel, membre du bureau exécutif des Écologistes
Sandra Regol, députée du Bas-Rhin
Jean-Claude Raux, député de la Loire-Atlantique
Raymonde Poncet Monge, sénatrice du Rhône
Marie-Charlotte Garin, députée du Rhône
Guy Benarroche, sénateur des Bouches-du-Rhône
Léa Balage El Mariky, députée de Paris
Samia Lakehal, trésorière nationale, Membre du Bureau exécutif
Nicolas Bonnet, député du Puy-de-Dôme
Éric Piolle, Maire de Grenoble
Danielle Simonnet, députée de Paris, co-fondatrice de l’Après
Jacques Fernique, sénateur du Bas-Rhin
Mathilde Ollivier, sénatrice des Français·es de l’étranger
Anne Souyris, sénatrice de Paris

Notre appel a été publié dans une Tribune sur le site du journal Libération