COP16 Biodiversité : une victoire symbolique, un double échec

La COP16 sur la biodiversité s’est tenue du 21 octobre au 1er novembre à Cali en Colombie dans un contexte de perte massive de la biodiversité nécessitant une action immédiate et d’ampleur.

La crise de la biodiversité : un enjeu politique

Selon l’IPBES*, un million d'espèces sont menacées d'extinction, et leur rythme de disparition est entre cent et mille fois supérieur au taux naturel d'extinction. Cette sixième extinction de masse menace non seulement les écosystèmes naturels, mais aussi les fondements de la société humaine. En effet, la biodiversité rend à l’humanité des services écosystémiques essentiels, comme la pollinisation des cultures, la purification de l’eau, la régulation des climats locaux et la protection contre les catastrophes naturelles.** 

Lors de la COP15 en 2022, le financement de la préservation de la biodiversité était un point central des négociations. L’accord signé allouait 200 milliards de dollars par an d’ici 2030 pour la préservation de la biodiversité dans les pays en développement, financements insuffisants face aux besoins réels.

Le 12 juillet 2024, grâce au travail des élu⸱es écologistes, des associations et ONG environnementales une victoire a été arrachée au Parlement européen avec l’adoption de la loi sur la restauration de la nature, visant à restaurer 20 % des écosystèmes dégradés d'ici 2030.

En vue de la COP16, les Écologistes, tout comme les partis écologistes du monde entier, portaient des exigences fortes :

  • fixer des objectifs plus ambitieux, notamment la restauration de 50% des terres et aires marines
  • sécuriser et augmenter considérablement les financements pour préserver la biodiversité
  • partager équitablement les ressources génétiques de la nature
  • reconnaître les liens entre préservation de la biodiversité, action climatique, gouvernance environnementale mondiale et paix.

Une victoire symbolique pour les peuples autochtones

L’inclusion des peuples autochtones a été une priorité, visant à renforcer leur rôle dans la conservation de la biodiversité. Un organe permanent sous la Convention sur la biodiversité sera créé pour assurer leur participation, reconnaissant leurs savoirs traditionnels comme essentiels dans la gestion durable des écosystèmes. Les Écologistes saluent cette reconnaissance, pour laquelle nous avons milité depuis longtemps.

Fausses solutions et double échec

Les débats ont également porté sur la généralisation du principe de “crédits biodiversité” sur le modèle des crédits carbone, une proposition soutenue par l’actuelle ministre de la transition écologique Agnès Pannier-Runacher. Cependant, de nombreuses études ont démontré l’inefficacité des crédits biodiversité depuis leur première mise en place en 1972 sous l’administration Nixon aux États-Unis, visant à protéger les zones humides. Détruire une zone humide en Pologne en échange d’un reboisement en Indonésie est un non sens écologique. Ces crédits promettent juste une marchandisation de la destruction de la nature sans permettre de réelle compensation des impacts écologiques.

Cette COP s’est surtout soldée par un double échec : l'absence d'adoption de règles ambitieuses et d'indicateurs fiables pour mesurer la réalité des efforts des pays depuis la COP 27, ainsi que l'absence d'accord sur le financement des mesures de protection de la biodiversité.

L’absence d’Emmanuel Macron : un signal regrettable

Dans un contexte où la mobilisation des dirigeants mondiaux est cruciale, l’absence du président de la République française à la COP16, comme aux précédentes, est regrettable. La chaise vide laissée par la France lors des COP, tout comme sa très faible contribution aux fonds mondiaux issus de l’accord de Kunming-Montréal, envoient un signal négatif quant à l’engagement de notre pays pour la biodiversité.

Ce désengagement de la France est d’autant plus regrettable que la biodiversité française est d’une richesse exceptionnelle, englobant des écosystèmes variés : forêts, montagnes, zones humides et littoraux. Notre pays abrite près de 10% de la biodiversité mondiale ! Nous avons donc un rôle fondamental à jouer dans la lutte mondiale contre l’extinction de masse des espèces. 

Malheureusement, si des plans ont été annoncés, ils manquent de moyens et de mesures de régulation contraignantes. La division par deux du budget alloué à la stratégie nationale pour la biodiversité prévue par le gouvernement Barnier est inadmissible. Les élu⸱es écologistes, appuyé⸱es par des ONG et des scientifiques, plaident pour une augmentation des financements publics pour la préservation de la biodiversité et pour une réforme des subventions néfastes, comme celles qui encouragent la monoculture intensive.

Aminata Niakaté et Sophie Bussière, porte-paroles nationales
Pauline Nales, représentante des Écologistes français au Global greens
La commission Biodiversité et nature


* IPBES : Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques

** Une étude de 2022 réalisée conjointement par 12 grandes universités dans le monde, dont Harvard et Oxford, a démontré que 400 000 morts dans le monde étaient d’ores-et-déjà dûs chaque année au déclin des pollinisateurs.