La proposition de loi Duplomb sacrifie les agriculteurs, au profit de l’agro-business

La proposition de loi Duplomb visant soi-disant à « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur·rice » n’a rien d’agricole : c’est une proposition de loi agro-industrielle, qui facilite le retour des pesticides les plus dangereux au mépris de la science, ainsi que la généralisation des mégabassines ; elle autorise la destruction des zones humides et l’augmentation de la taille des fermes-usines. Ce texte, c’est le choix du poison contre la prévention, et le choix du déni climatique contre l’évidence scientifique.
On prétend répondre à la crise agricole en augmentant la compétitivité des agriculteur·rice·s ? Mais pour une minorité de fermes, et à quel prix ? Celui de la santé des travailleur·ses et de celle de leurs enfants ? De l’épuisement de nos ressources en eau ?
Ne nous trompons pas : cette loi, c’est un cadeau pour les multinationales de l’agrobusiness, pas pour nos paysan·nes.
Les paysan·nes demandent à juste titre des revenus et des conditions de travail décent·es, des politiques publiques qui protègent notre agriculture de la concurrence déloyale d’autres pays, un accompagnement digne de ce nom pour adapter leurs fermes face au changement climatique.
La loi Duplomb ne prévoit rien de tout cela. Rien !
Ce texte, c’est une fuite en avant, ou plutôt une « fuite en arrière » de 20 ans. Vingt ans de progrès balayés pour contenter les lobbies de l’agrochimie.
Nous assumons même de dire qu’il s’agit d’une loi trumpiste, parce qu’elle instrumentalise une souffrance agricole réelle sans y répondre, et fait de l’obscurantisme une méthode de gouvernement. C’est le cas lorsque Annie Genevard, la ministre de l’Agriculture, affirme que l’acétamipride ne créerait « pas de désordres observés sur la mortalité et le comportement des abeilles », alors que la science montre très précisément le contraire.L’utilisation de néonicotinoïdes et autres pesticides entraîne un effondrement historique de la biodiversité : 80 % des populations d’insectes en Europe ont disparu ! N’en déplaise à la ministre de l’Agriculture et à une droite française devenue climatosceptique, l’effondrement de la biodiversité n’est pas un problème abstrait : c’est une menace concrète pour notre souveraineté alimentaire.
Si la proposition de loi Duplomb était déjà une attaque frontale contre la santé publique, elle constitue désormais un véritable affront à la démocratie. Par le dépôt et l’adoption d’une motion de rejet – un auto-49.3 inédit dans l’histoire parlementaire – la macronie et la droite, avec le soutien actif de l’extrême droite, empêchent tout débat démocratique à l’Assemblée.
Face à cette reculade qui n’apportera rien aux agriculteur·rices, nous, Écologistes, rappelons avec force plusieurs points :
- Cette loi ne profiterait qu’à une minorité d’agriculteur·rices et ne répond pas aux causes de la colère agricole.
- Il faut interdire l’importation de produits qui ne respectent pas les mêmes exigences qu’en France, plutôt que d’essayer de nous aligner sur les mauvaises pratiques des autres. Refuser le Mercosur au prétexte de ne pas favoriser l’élevage hyper-intensif tout en créant dans le même temps les conditions d’un tel élevage en France, c’est se moquer du monde !
- L’acétamipride est reconnu comme dangereux et sera d’ailleurs interdit à court terme au niveau européen : l’autoriser à nouveau en France est une véritable bombe sanitaire et écocidaire, pour laquelle les pouvoirs publics devront rendre des comptes.
- Malgré le déni des quelques réactionnaires qui s’agitent sur ces questions, l’urgence climatique et la crise agricole n’ont qu’une seule voie de salut possible : l’agroécologie. Les pouvoirs publics doivent accompagner la transition, pas l’inverse.
Nous, écologistes, continuerons à nous battre sans relâche pour que notre santé soit enfin prise au sérieux par ce gouvernement, et pour que les paysan·nes de ce pays soient respecté·es, avec la mise en place de politiques qui prennent en compte les vrais enjeux agricoles.
Marine Tondelier, secrétaire nationale
Aminata Niakaté et Eric Piolle, porte-parole
Commission Agriculture et Ruralité
Photo : Aqua Mechanical Attribution 2.0 Generic