Pour le respect de l'Etat de droit en Turquie

L'arrestation du maire d'Istanbul, Ekrem İmamoğlu avec une centaine d’autres élu·es le 19 mars, constitue une grave atteinte à l'Etat de droit en Turquie. Elle intervient au moment où M. İmamoğlu était sur le point d'être élu massivement (13 millions de voix sur plus de 15 millions de votant·es) par les militant·es et sympathisant·es comme candidat du Parti républicain du peuple (CHP, principal parti d'opposition) à la prochaine élection présidentielle. Il devenait ainsi un rival menaçant la réélection du président Recep Tayyip Erdogan, qui dirige le pays depuis une vingtaine d’années.

Au regard de la faiblesse des faits qui lui sont reprochés (une déclaration remontant à 2019 concernant l'annulation des élections municipales à Istanbul), le soupçon est fort que cette arrestation ait été ordonnée indirectement par le président Erdogan. Un soupçon renforcé par le soutien populaire dont bénéficie M. İmamoğlu, et qui s'est traduit depuis le 19 mars par des manifestations rassemblant chaque soir plusieurs centaines de milliers de personnes dans les rues d'Istanbul, bravant pourtant des interdictions de manifester et des charges policières de plus en plus brutales : plus de 1 400 personnes ont été arrêtées depuis le début de ces manifestations.

Depuis la répression de la révolte de Gezi Park à Istanbul en 2013, le gouvernement turc multiplie les gestes d'autorité au mépris des manifestations de la jeunesse turque et plus encore au mépris de l'Etat de droit. Un autoritarisme renforcé à l'intérieur depuis la perte des élections municipales de mars 2024, immédiatement suivies par la condamnation de Selahattin Demirtas et Figen Yüksekdag, ex-co-président·es du parti d'opposition HDP/DEM (collectif de partis de gauche, écologistes, et Kurdes), à des peines ubuesques de dizaines d'années d'emprisonnement.

Cette année-là, la Turquie a enregistré le triste record de 21 600 requêtes déposées pour violations des droits humains devant la Cour européenne des droits de l'homme – soit 35,8% des requêtes déposées devant cette institution. Cette dérive autoritaire ne se limite pas aux frontières turques : elle s'accompagne d'une politique extérieure très agressive, notamment en Syrie avec des bombardements sur les territoires kurdes et un soutien à des milices islamistes soupçonnées de massacres de civils, en violation grave du droit international humanitaire.

Alors que la Turquie réalise 41 % de ses exportations vers l’Union européenne du fait de l’union douanière existant depuis 1995 entre les deux entités, l’UE dispose de moyens de pression en faveur du respect de l’Etat de droit chez son voisin.

Dans ce contexte, Les Écologistes :

  • Appellent à la libération d'Ekrem İmamoğlu, Selahattin Demirtas, Figen Yüksekdag et des autres détenu·es pour des raisons politiques en Turquie ;
  • Demandent que soient réhabilité·es les maires élu·es en 2024 et injustement destitué·es, nombreux au sein du HDP / DEM ;
  • Rappellent au gouvernement turc que la Turquie est membre du Conseil de l'Europe, et qu'elle est à ce titre garante du respect des droits humains, au même titre que la quasi-totalité des Etats européens ;
  • Demandent au gouvernement turc de cesser ses ingérences militaires en Syrie ;
  • Déclarent leur entière solidarité avec la jeunesse turque et avec toutes celles et ceux qui se battent pour la liberté d'expression, la démocratie, les droits humains et le respect de l'Etat de droit en Turquie.

Aminata Niakaté et Sophie Bussière, porte-paroles Les Écologistes

La Commission Transnationale Les Écologistes